top of page

2. Un deuxième trimestre emporté par la vague du Covid-19 ?

Lors de la réouverture de la boutique Hermès de Canton en Chine le 11 avril 2020, le magasin aurait réalisé 2,7 millions de dollars de chiffre d’affaires en une journée. Ce phénomène d’achat de rattrapage - traduction de l’expression anglaise « revenge buying » - a donné de l’espoir aux autres pays encore confinés ; mais s’est-il pour autant généralisé par la suite ? 

 

Alors que le deuxième trimestre de cette année 2020 n’est pas encore terminé et que les résultats de l’industrie du luxe ne sont pas encore publiés, la reprise de l’activité permet d’avancer quelques observations.

Capture d’écran 2020-08-02 à 18.19.51.

La première est celle d’une reprise post-déconfinement plus lente en Europe et aux États-Unis qu’en Chine. Mi-juin 2020, 85 % des magasins du groupe Chanel avaient réouverts dans le monde. Philippe Blondiaux, directeur financier de Chanel a notamment constaté que « les ventes ont connu une croissance à trois chiffres en Chine et à deux chiffres à Paris, Milan et Berlin ». Mais « cette très bonne performance avec la clientèle locale sera insuffisante pour compenser l’absence de commerce international, de visiteurs étrangers et le fait que nos ventes hors taxes […] soient encore dans une très large mesure inexistantes » poursuivait-il.

 

Cette différence avec la Chine est par ailleurs d’autant plus exacerbée par le  glissement significatif des achats de luxe vers les marchés domestiques. Certes, les Chinois représentaient déjà un nombre important d’acheteurs de produits de luxe dans leur pays, et plus largement en Asie où les enseignes de luxe disposent d'un large réseau de boutiques, mais l’arrêt brutal du trafic aérien n’a fait qu’accélérer ce déplacement des achats vers le marché domestique chinois, dont l’une des conséquences directes est l’effondrement sans compensation totale des achats à l’étranger. 

Ce constat conduit à évoquer l’un des challenges de ce second trimestre post-confinement, à savoir la nécessité des marques luxe de reconquérir les clients locaux dans le reste du monde. Or en France par exemple, les boutiques parisiennes de luxe sont quasi-exclusivement peuplées de touristes, et seules quelques boutiques « locales » implantées dans les quartiers de la capitale comme Saint-Germain, touchent environ 50% de clientèle locale. La situation est identique dans les autres grandes villes comme Londres, New-York ou encore Milan. Et bien que cette clientèle ne suffira pas à compenser l’absence de la clientèle étrangère, les acteurs du luxe n’ont d’autres de choix que de s’adapter pour maximiser leur profit. Après huit semaines de confinement cependant, face à une population où la vie des clients du luxe est généralement hors de chez soi, ces derniers risquent également de se heurter à des états d’esprits changés. Il est probable que la santé et la qualité de vie apparaissent comme de nouvelles frontières au luxe, idée déjà amorcée avant la crise. Certains Chinois aisés par exemple, considèrent aujourd’hui de quitter les grandes métropoles pour une vie provinciale peut être plus saine. 

Pour autant, l’industrie du luxe n’est pas restée indifférente à ces répercussions et a d’ores et déjà mis en place certaines stratégies pour tenter de compenser leurs pertes du premier trimestre. Certaines Maisons ont notamment eu recours au «pricing power». Cette pratique consiste pour une entreprise à augmenter ses prix en période de durcissement économique. En augmentant ses marges, l’entreprise compense la baisse des volumes des ventes. Cependant, pour exercer cette pratique, « les marques doivent bénéficier d’une forte reconnaissance, d’un savoir-faire spécifique et plus globalement d’une aptitude à ériger des barrières à l’entrée difficilement surmontables par les concurrents ». Toutes les marques n’ont donc pas le privilège de pouvoir augmenter leur marge pour compenser leur perte. Mais une Maison comme Chanel dont la réputation n’est plus à faire peut se le permettre.  La griffe française a ainsi annoncé une augmentation de l’ordre de 5% à 17% sur une sélection d’articles de maroquinerie et de petite maroquinerie, sans manquer de préciser que ces modifications seraient effectuées « dans une logique d’harmonisation des prix entre les pays, afin d’éviter de trop grandes différences ». Cette technique reste néanmoins un pari pour les marques qui y ont recours. Et dans cette nouvelle ère où les mentalités semblent évoluer, seuls les mois à venir permettront d’apprécier si cette technique a réellement été rentable. 

IMG_2023.PNG

Publications  de May Berthelot, Responsable réputation et lutte anti-contrefaçon chez Videdressing et dont la communauté Instagram s'élève à 93,4K

Une étude réalisée par le bureau d'analyse actions du Crédit Suisse démontre que les conditions d'exploitation de l'industrie du luxe ne se sont pas détériorées au second semestre par rapport au faible niveau d'activité du premier trimestre mais ne se sont pas non plus significativement améliorées. Il est alors légitime de s’interroger sur les prévisions de cette industrie pour le troisième trimestre, et plus globalement pour l’année 2020.

©2020 par Luxe et Covid 19. Créé avec Wix.com

bottom of page